Je l'ai déjà raconté ici je suis éducatrice spécialisée. Je travaille pour le moment auprès d'adultes atteints de déficience intellectuelle, légères ou moyennes.
Dans mon métier, on croise des vies, on s'y attache, certaines s'accrochent a votre mémoire comme des coccinelles aux doigts d'Éloïse un jour de pluie.
Il y a quelque jours, j'ai appris que Nadine était condamnée.
Nadine a 6 mois de plus que moi. Quand elle est née on lui donnait 3 ans a vivre. Mais à force de lutte, de désirs, de travail et d'amour de sa mère, de ses amis, et de certains hommes aussi, Nadine a survécue malgré son cœur malade.
Est-ce qu'un cœur rempli d'amour tient mieux qu'un cœur asséché. Je ne sais pas. Toujours est t-il que Nadine a vécu plus de 30 ans de plus que ce qu'on lui promettait.
J'espère que ca durera encore un peu, même si je sais que l'espoir aujourd'hui se fait un peu plus rare...
Parfois, je pense a moi et a Éloïse, a cette pensée terrible que j'ai eu le jour de sa naissance ... Cette pensée qui me poursuivra je pense jusqu'à la fin de ma vie...
Et moi? Comment aurais je vécu la déficience de ma fille? Est-ce que, si le manque d'oxygénation de la crevette avait eu des conséquences j'aurais assumé? Comment je réagirais si a 34 ans, on m'annonçait qu'elle était condamnée?
Je ne sais pas. J'ai parfois cette pensée: ce miracle incroyable d'avoir une fille, qui malgré une naissance au rivière de la mort, est revenue des limbes avec une force, une vitalité, une combativité incroyable. Quand je la regarde, je vois cette chance que la mère de Nadine n'a pas. Il n'y a pas de pitié dans mes propos, loin de là. Juste, je mesure ma chance de ne pas être confrontée à cette souffrance que cette femme, affronte depuis 34 ans, cette souffrance de savoir que son enfant, par son handicap partira avant elle...
Ma mère a lu un jour un livre qui s'appelait "trois petits pas dans le sable". Lorsque ma grand-mère n'a plus eu que quelques mois a vivre, elle m'a citée cette phrase, lu dans ce livre:
"Quand il ne reste plus de jours a la vie, il faut rajouter de la vie aux jours".
Ce matin, en voyant , Nadine rire et se défoncer au d'jumbe, y prendre un réel plaisirs, j'ai repensé a ces mots. Et si j'avais le courage je dirais à Nadine:
"Vis Nadine, vis pleinement, prend le plaisirs qui s'offre a toi et oublie les jours."
J'y pense souvent, à ce que je deviendrai s'il arrivait malheur à ma fille ou qu'on nous apprenait une maladie incurable. Autant pour elle que pour moi. J'ai peur de ne pas la voir grandir, de ne pas être là pour ses moments de joies, pour ses chagrins d'amour… Alors je fais attention à nous, et je profite.
RépondreSupprimerJe crois Soizic, qu'il faut y penser sans que ce soit une obsession. Mais toujours mesurer sa chance, parce que beaucoup de gens vivent ce cauchemar, que nous avons la chance, pour le moment, d'éviter...
RépondreSupprimerJe vis pleinement chaque moment que m'offre la vie. J'apprends à ma "petite" de 8 ans et demi (et j'ai appris à mon grand de 32 ans aujourd'hui)à profiter de chaque petit bonheur. Savoir apprécier profondément ce que l'on a au quotidien parce que justement d'autres n'ont parfois pas (ou plus) cette chance, c'est respecter ce don. C'est ma façon de vivre depuis longtemps tout en essayant d'être là quand il le faut si autour de moi on souffre ! Alors, Nadine, oui vis, vis pleinement chaque secondes de ce que ton souffle et ton coeur te permettront. Profite et Toi, Maman si courageuse, je t'admire d'avoir autant de courage et d'amour. Tu mérites un infini respect.
RépondreSupprimerJe suis tout à fait d'accord avec toi! Ceci dit, je me suis peut être mal exprimé, mais Nadine n'est pas ma fille mais bien une jeune femme dont je m'occupe dans le centre où je travaille. Mais ce la n'empêche pas de s'attacher et d'admirer Nadine et sa maman...
RépondreSupprimeroui, oui j'avais bien compris et je m'adressais à la Maman de Nadine... tout simplement si par hasard elle lisait ton blog. J'admire ces parents et ces enfants qui arrivent malgré la douleur et le chagrin à avancer chaque jour un peu plus....
SupprimerJ'ai lu ce livre, il est poignant.
RépondreSupprimerC'est pas facile, même s'il est malade, de voir son enfant partir avant soi...